
Japan Sinks: 2020 est une série que j’attendais avec impatience comme vous pouvez le voir dans cet article. Il s’agit du dernier anime du réalisateur Masaaki Yuasa aux côtés du Studio SARU, studio qu’il a fondé en 2013. Il participe à la production en tant que second réalisateur, laissant les commandes principales à Pyeonggang Heo qui a déjà à son actif plusieurs rôles en tant que réalisateur d’épisode et storyboarder. De plus, il s’agit d’un « Netflix Original » qui a pu avoir droit à une diffusion mondiale au même titre que Devilman Crybaby en 2018. Qu’en est-il donc de cette série au haut potentiel ?
Alors que les Jeux Olympiques de 2020 viennent d’avoir lieu à Tokyo, quelques temps après, une puissante série de séismes frappe le Japon. Le pays est plongé dans un désarroi total autour duquel la famille Mutou tente tant bien que mal de se dépêtrer. Ainsi commence l’aventure tragique et haut en rebondissements des Mutou pour leur survie dans un Japon en péril.
Japan Sinks: 2020 a un postulat intéressant à étudier. Le Japon est un pays à forte activité sismique. Il se place parmi les 5 pays les plus touchés de tremblements de terre et 20 % des séismes à forte magnitude (égale ou supérieure à 6) est dénombrée dans cet archipel. En ce sens, un anime relatant un scénario apocalyptique suite à cette catastrophe naturelle ne peut que faire preuve d’une grande implication en terme de nationalisme et de présentation des mœurs actuels. Il a beau s’agir d’une adaptation d’un roman datant des années 70, les thèmes restent d’actualité.
Cela est flagrant quand l’anime met un point d’honneur à présenter dans la première partie de l’épisode la banalité de la notion de séisme pour la population. Les personnages, bien que conscients du danger, ne le prennent pas particulièrement au sérieux malgré une première amplitude sismique relativement forte, qu’ils notent d’eux-mêmes. Ils continuent leurs activités sans se soucier des mesures usuelles à suivre en telle situation car il s’agit d’une normalité, voire banalité pour eux. Plusieurs situations sont présentées en vue de renforcer cette notion. Qui plus est, antérieurement à l’avenue du séisme, le quotidien de leur vie est présenté avec simplicité et légèreté. Les choses anodines telles une balade dans un parc, des gens assis profitant de l’air frais, des oiseaux volant dans les airs, sont montrés avec une mise en scène et une bande-son rendant plus personnelle la situation. Le tout, de par son naturel est d’une grande beauté.
Le premier épisode est plutôt intéressant et donne une place majeure à la contemplation et au suivi de la vie quotidienne de la population face à ce séisme.
Concernant la bande-son, elle est très jolie mais un peu trop redondante à mon sens et avec une dissonance sur plusieurs moments. A diverses reprises, à la place de sélectionner une musique tragique ou bien une absence de fond sonore, le staff choisissait une bande-son joyeuse cassant un peu le moment présent. Les morceaux auraient du être plus variés et mesurés selon la situation. Certains allaient aboutissant à des séquences mémorables d’autres beaucoup moins.

Le contraste avec l’après-séisme n’en est que plus grand. Dès lors, l’anime n’entre pas dans la subtilité et choisit de jouer carte sur table en montrant fidèlement le déroulement de ce dernier. Il est abrupt, cruel et tragique. La banalité des instants passés semble si lointaine et ne peut que manquer. Les personnages sont livrés à eux-mêmes et en proie à une situation catastrophique où tout est sens dessus dessous. L’œuvre réussit sans difficultés à mettre en valeur ces événements et nous ébranler de par le ton cru adopté. Ce début est saisissant et bénéficie d’un casting diversifié rafraîchissant. (La famille Mutou étant une famille japo-philippine.) La direction artistique est un régal et comble complètement en présentant des plans de Tokyo en ruines dont l’esthétique parle d’elle-même.
À la suite de cette ébauche captivante brillant tant de par un character-design vivant, que par une mise en scène pointant du doigt les éléments clés de l’intrigue, Japan Sinks: 2020 réussit à dépeindre un optimisme et des relations familiales agréables et louables dans un tel contexte. L’œuvre passe dans une phase survivaliste qui advint être riche en émotions toujours par son caractère rude mais aussi surprenant tant il tranche en deux de manière vive une routine à laquelle on s’était habitué. Néanmoins, par la suite, à mes yeux, la qualité de l’œuvre ne fait que baisser, de minutes en minutes. Le rythme auparavant maîtrisé commence à sembler essoufflé de par ces abondantes séquences visant à instaurer plusieurs rebondissements. Bien que la situation sismique peut expliquer la suite d’éléments inopinés, le tout commence vite à être répétitif. L’œuvre se veut émotionnelle mais tend trop facilement à prendre des facilités en termes d’écriture pour accéder à cette finalité. La surabondance de morts n’est pas tant un problème en soi, mais le traitement qui en est fait l’est.
De mon côté, cet optimisme à toute épreuve m’a plus sorti de l’oeuvre qu’autre chose. En dépeignant d’un côté une situation humainement tragique dans ses premiers épisodes et de l’autre un positivisme trop marqué, l’anime m’a totalement déboussolé. Véhiculer un tel message ne me déplaît pas, mais la manière dont il est traité me dérange beaucoup plus. Plus que d’être subtil c’était très grossier, « une petite photo ? ».
A de nombreuses reprises des moments durs comme la mort d’un personnage, une tentative de viol et j’en passe, enchaîne sans transition sur une ambiance guillerette qui sent bon la violette, difficile pour moi d’être convaincu sur ce point. Les personnages dans les premiers épisodes font preuve d’un tel détachement, de peu d’empathie, n’ont aucun sens du danger et rebondissent si vite sur leurs pieds, excepté à quelques reprises, que je n’arrive pas à comprendre leur comportement peu adapté aux circonstances.


Plutôt que le caractère cru auparavant montrer qui suffisait à promouvoir du sentimental, l’anime s’essaie maintenant à une approche plus directe. J’ai malheureusement trouvé cette dernière mal abordé vu qu’elle se contente à présent de répéter en continu le même schéma sans penser à lui donner plus de poids par des dialogues plus ciblés et une meilleure mise en avant du conflit émotionnel que subissent les personnages.
Ce même schéma se retrouve également vers la fin des épisodes où un événement tombe d’un coup et finalement le prochain épisode ne revient pas plus dessus. On n’a pas vraiment le temps de s’attacher et s’endeuiller de la situation. Conséquence, pas une seule fois l’anime ne m’a ému dans sa première moitié. Plus que de pleurer, j’étais en proie à une incompréhension normalisée et parfois même à des fous rire alors que la situation ne s’y prêtait pas.

Passé quelques épisodes, un semblant d’intrigue semble se mettre en place. Cette intrigue n’a pourtant au final eu aucune plus-value. Se voulant à suspense, elle tente d’instaurer des mystères qui placent peu à peu le point principal au second plan. Je n’en ai retenu qu’un amas de moments se plaisant à présenter de la vulgarité dans le simple but d’en avoir. Japan Sinks: 2020 a commencé à user de moyens bas-de-gamme (tels que des cliffhanger abusifs au vue de leur nature finale vide) en vue d’entretenir des pseudo-rebondissements qui ont perdu fortement de leur charme initial vu leur manque critique d’incidence tant sur les personnages que sur l’histoire en elle-même. Si de base, il pouvait s’agir d’une tentative d’atténuer le chaos de la situation et conserver une dénonciation des mœurs se voulant opulents et dangereux, le traitement qui en fut fait n’était qu’une vulgaire esquisse ne détaillant pas son propos tout en éclipsant le thème principal.
Les personnages quant à eux avaient déjà commencé à perdre en attrait dû à une baisse de régime en termes de dialogue exprimant leurs relations et émotions. Ils devinrent en plus de cela particulièrement passifs. La production prit elle aussi un coup avec un visuel moins inspiré qu’au début mais qui se retrouva porté par les character-designs s’efforçant de sauver les meubles.
Comme dit Antony une déchéance progressive du visuel… Le trait est grossier, le matériel trop brute et manquant de soin. Sans conteste, une des moins bonnes productions de Science Saru.

Par la suite, l’œuvre parvint à revenir au centre de son histoire apocalyptique et continue à faire subsister un sentiment d’obscurité vis-à-vis de la suite. Pour autant, le tout est amené de manière brutale et l’enchaînement des situations, aussi bien que le développement des personnages m’est apparu grandement évasif. Heureusement, il est à admettre que certains moments importants ont su se montrer plus touchants et personnels de par leur impact et la finesse des répliques. Ils sont cependant en moindre nombre en comparaison au reste qui présente un caractère obséquieux se révélant inévitablement futile.
Bien heureusement, l’histoire se voulut optimiste et proposa sur sa fin des échanges plus ingénus, mieux mis en scène et en raccord avec les thèmes. À ce titre, elle proposa de nombreuses photographies magnifiques et réussit finalement à se remettre aussi sur ses pattes du point de vue visuel.
Comme énoncé, l’anime se rattrape sur sa dernière moitié en recentrant son propos. Même si j’ai ressenti encore une fois un certain ennui sur quelques épisodes, l’oeuvre reprend de belles couleurs sur plusieurs séquences marquantes et grâce à une histoire plus lisible. La fin de l’épisode 08 est sensiblement émouvante et le dernier épisode est à mon sens une très jolie réussite. Malgré pas mal de soucis, on ne peut enlever à cette oeuvre une vision d’auteur ne pouvant nous laisser indifférente. Une histoire plus courte et moins évasive aurait tout de même probablement été préférable pour les quelques personnes comme moi qui se sont ennuyées sur la grande majorité de cette oeuvre.


Bilan : Tout sombre profondément, même l'anime...
En définitive, Japan Sinks: 2020 fut un anime à fort potentiel qui choisit finalement n’être qu’une surabondance de rebondissements sans valeur scénaristique et une histoire écrite de manière floue. Si une partie de l’œuvre présente certes un caractère honnête, l’autre nous est apparue que comme une vulgaire émission à sensations qui se révéla extrêmement maladroite dans son propos avec un optimisme mal calibré. Le tout s’essaya aussi à être vainement tire-larmes. À nos yeux, l’histoire aurait mieux gagné à être plus précise dans son propos plutôt qu’à se perdre de vue et ainsi provoquer des défaillances sur ses personnages et sa propre écriture. Nous ressortons tous deux déçus de Japan Sinks: 2020 malgré quelques fulgurances sur la fin qui n’ont pas réussi à effacer tous ses torts.

L’anime est disponible sur la plateforme Netflix.
Juste pour dire en tant que lecteur et fan du célébre chef d’oeuvre de SF La Submersion du Japon: mais sérieux ce truc est vraiment sensé en être l’adaptation?! ça n’a absolument rien, mais rien à voir! Si vous cherché quelque chose de construit et de passionnant passez votre chemin et lisez le roman, cette anime est tout juste bon pour tué le temps!